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mercredi 20 avril 2011

4_Mme Lambrin



Nous habitions au premier étage en fond de cour. Au rez de chaussez, Madame Lambrin, la propriétaire, une vieille dame avec tout ce que l'âge peu apporter comme troubles, elle souffrait de quelques insuffisances auditives, de la vue, et d'une mémoire qui lui jouait des tours. C'était dans son petit jardin qu'on la voyait le plus souvent, derrière le bâtiment, un potager et des fleurs. En saison froide elle vaquait à l'intérieur, dans son appartement. De temps à autre son fils venait lui rendre visite, un financier vivant à Londres. Depuis longtemps il lui proposait le confort d'un lieu moins modeste, mais Madame Lambrin insistait à vivre l'endroit qui était toute sa vie depuis son mariage. Il respectait son choix, il savait qu'il n'y avait rien à faire, que le bonheur de sa mère se trouvait dans ses habitudes, ses souvenirs. Elle était fière de son fils unique, bien qu'il ne promettait pas une descendance, il était marié.
Madame Lambrin me souriait quand je la croisais aux abords de son logis, je lui répondais par un sourire, "Bonjour Madame".
Je revenais d'une course à l'épicerie du quartier. "Pourquoi es tu si triste ?" me demanda t elle. Elle m'invita chez elle manger du chocolat. J'hésitais, j'avais peur que ma mère apprenne que j'ai dévié de l'itinéraire, mais bon, j'étais chez la voisine, et c'était la propriétaire.
Quand j'avais à prendre une décision, je réfléchissais plus d'une fois aux conséquences, surtout quand ça faisait longtemps qu'on avait pas corrigé mon derrière, au moindre écart ma mère me rappelait comment on se tient. Je venais de me faire rosser hier, et pour si peu, ma mère n'en ferait rien, elle exprimerait quelques insatisfactions tout au plus. Non je ne me ferais pas gronder, elle n'en saurait rien, je ne resterais pas longtemps, juste quelques minutes, le temps d'engloutir un chocolat ou deux.
Je suivi Madame Lambrin tout en expliquant à la sourde oreille que je n'avais pas beaucoup de temps.
Chez la vieille dame, c'était plein d'antiquités que lui fournissait son neveux antiquaire, il louait chez sa tante le rez de chaussez de l'immeuble en face, celui côté rue.
Madame Lambrin alla prendre et ajuster son appareil auditif, sans lequel elle n'entendait presque rien. On devait lui crier près de son oreille valide pour communiquer quand elle ne portait pas sa prothèse. Le monde devait lui sembler bien calme, dès fois elle était triste, le regard pointant dans le vide, comme si il n'y avait rien, comme si elle était seule, que personne ne faisait attention à elle, comme si elle pensait à la fin.
J'avais oublié de faire attention en m'asseyant, je me remis debout droite, d'un coup, comme si on m'avait brûlé, puis je me rassis plus prudemment face à la dame. Elle me sourit à nouveau, avec à la fois une certaine compassion et un amusement. Je la senti complice de ce qui m'était arrivé, j'en avait honte. Comment j'avais peu oublié de le cacher, je rougissais.
"Tu as reçu une fessée ?" me demanda Madame Lambrin.
"Non Madame", je mentais, j'en rougissais d'avantage. Elle continua son questionnement qui me mettait mal à l'aise, j'avais envie de partir sur le champs, mais ç'était lui avouer qu'elle avait raison, et ça ne se faisait pas de partir comme ça, on devait en demander la permission.
Maintenant elle demandait si c'était mon père ou ma mère qui me fessait.
"Ma mère", je répondis brièvement. Ca continuait, j'avais une boule dans l'estomac, et envie de partir ou de fondre en larmes. Est ce qu'elle me donnait le martinet ? Je ne savais pas ce que ça voulait dire le martinet. Madame Lambrin alla chercher une boite de chocolats, je me détendais.
Elle passa aux confidences, quand elle avait mon age, son papa lui donnait le martinet quand elle n'était pas sage, et c'était pour son bien, je comprendrais plus tard, aujourd'hui je devais être sage pour ne pas être punie. C'est longtemps après que son histoire éveilla en moi quelques excitations. Les chocolats étaient délicieux, des meilleurs que j'ai mangé à cette époque, au lait, fourrés de praliné et de noisettes. Elle m'invita à la suivre dans une chambre, elle ouvrit un tiroir et en tira un instrument que je voyais pour la première fois. "C'est un martinet" me dit elle, elle fit siffler l'instrument dans l'air, je me raidis, morte de peur. Si elle ne me barrait pas le chemin, je me serais sauvée. Sur un ton mielleux elle répéta sa question "C'est pas avec ça qu'elle te puni ta maman ?", "Non Madame, avec la ceinture" répondis je. "Je l'offrirais à ta mère, il ne sert plus ici", elle prononça ces mots dans un naturel des plus commun, avec la certitude de faire une action généreuse, j'étais aux bords des larmes à nouveau.
Madame Lambrin m'invita à finir les chocolats avants de partir, elle me promit aussi de m'offrir une boite des mêmes. Je me retenais de lui demander, quand j'aurais fini mon thé j'oserais.
En sortant, angoissée, sur un ton des plus résigné, je priais Madame de pas donner le martinet à ma mère. Elle accepta à la condition que je sois sage et que je vienne lui rendre visite plus souvent.
Au retour ma mère gronda mon retard, est ce que j'en avais pas reçu assez hier ? Est ce qu'on doit en reparler ? C'était Madame Lambrin, elle voulait me parler, j'expliquais, une des rare fois où ma mère acquiesça sans répondre.
Comme après chaque course, je présentais le ticket, on faisait l'inventaire et les comptes, au centime près je rendais la monnaie. J'avais déjà eu droit à une leçon sur l'exactitude, l'inattention, l'argent ne tombait pas du ciel, et je devais le recompter quand on me le rend.
J'avais aveuglément accepté mon dût, il manquait dix centimes dans ma bourse, ça a fait toute un histoire quand je suis rentrée. Depuis, plusieurs fois je recomptais avant d'accepter, à la moindre erreur, plus souvent de ma part, j'étais en panique.
Les visites chez Madame Lambrin ne durèrent que quelques mois, la vieille dame perdait peu à peu son autonomie, et son fils décida conjointement qu'il serait plus sur de la placer en retraite, dans une maison spécialisée, un endroit chic qu'il payait certainement une fortune, j'en eu quelques échos par ma mère qui ne fit pas indifférente au sort de la vieille dame.
Son appartement resta dans le même état, inhabité, elle pouvait croire qu'en des jours meilleurs son logis l'attendait.


vendredi 15 avril 2011

3_La Garde



Nous étions chez marraine, à quelques quinze minutes à pieds de la maison. Un bâtiment un peu plus chic que la maison ouvrière en brique rouge que nous habitions.
Un samedi d'automne comme bien d'autres, marraine et son mari travaillaient au marcher, ils vendaient de la viande, leur fils Michèle suivait des cours d'équitation.
Rien de bien particulier leur trois pièces, des meubles rustiques modernes, de la moquette épaisse, un décoration modérée et kitsch, des vases à fleurs, des lampes, et des reproductions encadrées.
Dans la chambre des enfants un lit deux places superposées en métal, et les exubérants posters de chevaux de mon cousin. La présence plus discrète de ma cousine se résumait à quelques poupées qu'elle avait disposé comme des sculptures sur l'étagère et le bureau.
On venait fréquemment chez marraine pour les dîners, le soir avec mes parents. Elle, son mari, sa fille et son fils, moi, ma mère et mon père, à table ça discutait. Les grands avaient la parole, nous autres ont servaient la table, les couverts, les plats, les bouteilles, ont débarrassaient, ont apportaient à la demande. Nos bavardages discrets n'interféraient pas l'éloquence des parents. Les conversations entremêlaient actualités, pour ne pas dire politique, vacances, travail, maison, ...
L'éducation, voilà un sujet récurent qui nous pétrifiait, ont baissaient la tête pour ne pas faire allusion qu'on étaient au centre du sujet.
"Elle en a reçu une bonne hier, tu t'en souviens Corine ?" Ma cousine se taisait, à ses mots allait-on lui faire revivre la même scène. Marraine n'attendait pas de réponses, elle prévenait, elle se ventait des bons préceptes qui régissaient la demeure. Ici c'était papa qui dispensait la ceinture, celle nouée à sa taille, là bas, dans la chambre des parents, les fesses nues allongés à plat ventre sur le grand lit, les hanches remontées sur le traversin.
Oh, comme ça m'excitait de savoir qu'il se faisaient battre, j'en jouissais secrètement et brièvement avant que ma mère ne surenchérisse "Je vais devoir sévir, il y a déjà longtemps qu'elle aurait dut s'en prendre une, j'ai été trop bonne avec elle". Après les présentations avec le martinet j'ai réussi à éviter la punition pendant près de deux mois, "Il était temps qu'elle goûte à la discipline" s'était vantée ma mère, ça m'avait, parait il, remit les idées en place, je faisait plus attention maintenant. Durant ces éloges de la sévérité, les regards menaçants pointaient en notre direction.
Mère rappelait ce qu'il en était à son époque, les fesses nues dressées à la ceinture du père, la génuflexion au coin sur les pois secs. Chez mon oncle c'était le martinet, pour marraine,  douze coups de verges, autant de raisons de nous faire accepter à gentillement présenter nos derrières quand on nous le demande.
La vie était dure et savoir se résigner nous éviterait maints problèmes, il fallait filer droit,c'était notre vaccin pour l'avenir.
Au fil des argumentations, mes "Merci Maman" devenaient plus sincères.
Je le voyait mon avenir quand je remarquais mère, nerveuse, revenir du travail.
Elle en parlait avec sa soeur au téléphone de ses humiliations, "cette salope", en parlant de sa patronne. Il n'y avait pas un lieux qui diffère, pas la peine d'en chercher un quatrième, de toute façon on te fait trimer et on te stresse, et tu n'as pas intérêt à répondre, sinon on te vire en te faisant craquer. Elle prenait ses cachets pour se calmer, et il y avait ses cigarettes.
Mon père me disait que j'étais moche et grosse, qu'il m'enverrait au turbin dès que ce serait possible. Je le détestait et j'en avais peur, il m'avait maintes fois prévenue, si ma mère venait se plaindre de moi auprès de lui :"j'vais t'faire saigner ton gros cul à coups de trique".
Je le haïssais.
Un soir où il m'insultait, j'avais osé lui répondre, pas grand chose, je me souviens plus des mots, il devais y en avoir un vulgaire. "Je vais te saigner le cul !", il était en rage, il est allé dans la salle de bain chercher la sangle en cuir avec laquelle il affûtait son rasoir, manche en nacre, un cadeau de son beau père.
Quand je l'ai vu revenir le cuir à la main, j'ai couru, vite, instinctivement j'ai fui dans la chambre de ma mère et je me suis glissée péniblement dans l'espace entre l'armoire et le mur, j'étais coincée dedans, impossible de m'atteindre à moins de déplacer l'armoire, et c'était pas une mince affaire. J'y ai passé la nuit. Le lendemain ma mère m'a gracié pour que j'en sorte, autrement j'y serais restée toute ma vie, j'avais même demandé à plusieurs fois si c'était vrai, si on n'allait pas me battre.
Quelques jours plus tard, mère m'appela au salon, mon père était là, il tenais la sangle, "Tu te déshabilles !", j'étais en robe de nuit. Je couru vers ma cachette, l'armoire avait été déplacée contre le mur, j'étais piégée dans ce coin. "T'entends ce qu'on te dit !" je recevais déjà des coups. Battue, face contre le mur, je déboutonnais et fit glisser la robe.
Je finis recroquevillée par terre recevant des coups, jusqu'au premier sang il avait frappé ma chair. C'était la première fois qu'il me frappait, un souvenir si violent comme si il datait d'hier.
Quelque part ma mère me protégeait de lui, même si j'entendais parfois sa menace " Tu veux que je demande à ton père qu'il te corrige". Sa voix n'admettait aucun doute sur la proposition.

En ce beau samedi d'automne, ma cousine Corine portait une tenue exemplaire que j'enviais, chemise blanche à col rond, sertie d'un chandail rouge, une jupe à carreaux écossais rouge, des collant opaques en nylon rouge et des ballerines marie-jeanne vernies rouges assortie, ses beaux cheveux blonds, long, coiffés d'un serre tête. Moi vêtue de mes fripes habituelles dont je n'ose pas me souvenir. Les laines étripées, les couleurs délavées, recousues par endroit, les chaussures usées.

Josiane, ma tante, la soeur de ma mère, vivait d'une pension que lui versait son ex mari, et de petits boulots, notamment les ménages, deux fois par semaine chez Madame Dubourg, une cadre à la retraite issus du milieux scientifique. La garde robe de ma mère se composait en grande partie des dons que Madame Dubourg faisait à ma tante, ce qu'elle ne portait plus. Des vêtements très classiques, austères, sans fantaisie aucune, comme ses anciens tailleurs de travail, des chaussures à talons bas, des chandails, tous ces habits de provenance bourgeoise traduisaient les goûts d'une femme bien mure et réservée. C'était de la marque disait ma mère.
Josiane, parfois accompagnée de sa fille Monique, rapportait des sacs à la maison. Ceux là contenaient aussi bien les anciens vêtements de la dame, que les fripes déjà bien utilisées de Monique qui m'étaient destinées. Ma mère avait déjà disposé sur le canapé ce qui me convenait.
"Cécile", j'étais appelée au salon pour l'essayage.
"Tournes toi", "Marche un peu, qu'on voit", si il y avait désir à ajuster à ma taille, raccourcir un pantalon au trois quart, ma tante était douée pour la couture et s'en chargeait volontiers. Elle prenait un centimètre et des aiguilles, et sous peu je recevait mon dut dans l'armoire.
Si dans la petite école je prêtais peu attention à ce qu'on me faisait porter, au collège j'en étais humiliée. Je voulais avoir le droit de porter des jeans, même Corine en avait, j'ai demandé.
Ma mère me répondit par une pluie de gifles, je n'étais pas satisfaite de ce qu'on me donnait, encore des caprices. J'eus droit pendant une semaine à une heure par jour de génuflexion sur les pois secs avant de me coucher, et je devais la remercier d'avoir été suffisamment bonne de pas me donner la discipline, bien que différent, c'était tout aussi terrible. Je posais, les mains sur la tête, sur le parquet du salon face à la bibliothèque, je me faisais gronder quand je baissait les mains. Ma mère me rappelait la menace du martinet, celle du père, et m'interdisait de pleurer si il m'en venait l'envie. Au bout de trente minutes j'avais droit à cinq minutes de pause. Les genoux meurtris, estampés par les pois. Avec mon père elle regardait la télé, moi je me distrayais en écoutant et imaginant ce qui se passe à l'écran. La télé c'était pas pour moi, si ma mère me surprenait à lorgner l'écran, c'était la gifle. Les seules fois que je pouvais poser mes yeux sur l'écran c'était quand nous étions à table chez marraine.

Comme j'enviais Corine, elle avait des habits neufs, marraine les achetait au magasin pour elle, elle lui demandait même d'en choisir certains. Quand elle demandait un puzzle, elle ne recevait pas de gifles, c'est parce qu'ils étaient plus riches, je le savais bien.
Je voulais la punir d'être si belle, de se faire offrir des jouets, et puis ça me ferait plaisir de lui donner une fessée.
Josiane était partie faire quelques courses, c'était elle qui nous gardait les mercredis et les samedis chez marraine.
J'avais bien une heure pour présenter à ma cousine une situation propice à claquer ses fesses. Corine était d'un an plus jeune que moi et moins inventive, aussi j'eus souvent l'initiative de lui proposer des jeux.
Aujourd'hui ont joueraient à la mère et à la fille, elle l'accepta volontiers. Ce qui fut plus difficile c'était lui faire accepter la fessée. Juste une petite, je lui justifiais que ça faisait partie du jeux, elle savait bien qu'une mère peut punir sa fille. Ca ne lui ferait pas mal, elle hésitait.
Elle fini par s'allonger, le ventre sur la moquette du salon, moi je m'assis sur ses cuisses, ainsi je l'immobilisais. Je lui relevais sa jupe, je voulais que ça lui fasse mal, qu'elle en pleur, comme d'une vraie fessée qu'elle aurait peu recevoir. Elle gigotait se rendant de plus en plus compte de son impuissance. Elle me supplia d'arrêter, elle était aux bord des larmes, elle ne se serait pas fâché si m'étais arrêté là, mais je lui ai dit que ce n'était pas fini pour elle et je continuais les claques sur son derrière. Elle pleurait et moi j'en voulais plus, Je fini par la relâcher, aussitôt elle couru se cacher dans la chambre de ses parents.
Qu'avais je fais, j'allais pour m'excuser de m'être emporté, elle me bloquait la porte, elle ne voulait rien savoir de ce que je disais, elle ne me répondit pas. Je continuais donc à jouer seule jusqu'à l'arrivée de Josiane. Ca lui passerait comme quand elle se chamaillait avec son frère, mais non elle restait stoïque dans la chambre.
Au retour de Josiane, elle recommença les pleurs pour noter qu'elle avait été offensée, ça m'inquiéta. Je n'entendis rien de la discussion qui se tenait dans la chambre des parents, Josiane en sorti furieuse, Corine l'accompagnait.
Ma tante prit un ton solennel et autoritaire, elle me grondait en concluant que comme j'appréciais la fessée elle m'en ferait profiter. Elle demanda à Corine où se trouvait la discipline, avec quoi papa corrigeait. Corine désigna la laisse du caniche posée sur la commode, une natte ronde tressée de fines lanières en cuir, un peut plus grosse qu'un doigt. Josiane saisi l'instrument et le plia en deux. La vue de l'instrument m'effrayait, la peur me dominait, les larmes montaient, Elle mentait Corine, c'était pas la laisse, pas la laisse, c'était la ceinture, je le savais... Josiane ne voulait rien entendre, "Tu te tais !".
La jupe relevée, cambrée sur l'accoudoir du canapé en cuir, j'espérais en l'indulgence de ma tante, juste quelques coups, pas trop fort, qu'elle ne me rosse pas comme le faisait ma mère.
C'était la première fois qu'elle me mettait dans une telle situation, j'avais entendu dire qu'elle avait bien éduqué sa fille, sans plus de précisions. Josiane ne ménagea pas sa force, les deux coups frappés à vive allure me redressèrent dans les cris, instinctivement je me mis à courir. Je me suis enfermée dans les toilettes, près de la porte d'entrée, dans le couloir, un loquet en bloquait l'accès.
derrière la porte j'entendais gronder les menaces de ma tante m'invitant à sortir. Elle le dirait à ma mère, je le regretterais. Moi je m'attendais à ce qu'on me pardonne avant de sortir, il en était hors de question et ce serait pire quand on me ferait sortir d'ici. Attends un peu qu'il revienne ton oncle, on trouvera un moyen pour te prendre, et il n'y aura plus d'excuses valables, réfléchis.
Même si j'avais des doutes, si je me demandais si je devais ouvrir, j'étais à l'abri, en vain ma tante avait essayé d'ouvrir, d'ici quelques heures les colères se seraient dissipées, enfin ce que j'espérais. On m'oublia jusqu'au soir, heureusement pour moi il y avait d'autres toilettes dans la salle de bain.
J'entendais peu à peu les gens rentrer dans l'appartement, mon cousin qui revenait en fin d'après midi de l'équitation, puis marraine le soir, suivie de son mari.
J'entendais qu'on discute, qu'on s'offusque, des pas venaient en ma direction, des pas lourds, ceux de mon oncle, ma tante aussi sûrement. On me somma de sortir de suite avant qu'il ne soit trop tard, de toute façon mon oncle enlèverais la porte et de toute façon je serrais punie, et d'avantage si je n'obéissais pas sur le champs. Je  pensait qu'il ne pouvait pas l'ouvrir, il a forcé sur la porte, et avec une règle plate soulevé le loquet. Aussitôt ma tante rentra et m'attrapa par ma courte chevelure, elle me traîna au salon devant l'assemblée. Marraine, Michèle et Corine à table, ils venaient de dîner. Ils me regardaient fautive, ma tante me secouait un peu, elle me cambra sur l'accoudoir du canapé et demanda à mon oncle de me retenir, parce que ça allait dérouiller. Mon oncle s'assit de coté sur le canapé et me retint tendue par les poignet. Son étreinte me faisait déjà mal, je sentais qu'il avait des mains d'acier.
Ce soir ma tante m'avait fait hurler, j'en avait perdu mon timbre, la voix cassée. Quand elle me raccompagnait à la maison elle grondait encore, j'allais entendre ce qu'en dirait ma mère, j'avais pas fini d'en prendre. Elle me posta debout devant ma mère qui criait des remontrances. "Fais voir tes fesses !", elle examina mon derrière et mes cuisses boursouflées, moi pleurante, je suppliais, mon père était partisan pour prendre sa sangle et me rosser le dos si il fallait.
Ma mère remercia sa soeur de m'en avoir collé une bonne, elle en conclu que pour aujourd'hui ça suffisait, mais c'était fini les jeux chez marraine, et comme j'appréciais tant de jouer à la fessée, elle m'arrangerait une garde chez la voisine, en haut, là où ça frappait.


mercredi 6 avril 2011

2_Bienvenue au Martinet






Le martinet, manche en bois beige, des lanières blanches en cuir, rondes, scellées par une bande en cuir bordeaux. Ma mère l'avait appelé "la discipline du chien", et en thermes plus courts, "la discipline". Je l'ai aperçu peu après l'arrivée du chien, un grand lévrier à poil courts, une bête de course, stupide et fière.
Le bel animal comptait parmi les fiertés de ma mère, tout comme ma subordination, et particulièrement en public.
Le martinet avait sa place en haut d'une bibliothèque, dans le salon, à une hauteur que je ne pouvais atteindre qu'en montant sur une chaise. Pendant longtemps je n'ai osé voir de plus près à quoi il ressemble, compter les dix lanières qui le composaient, pour moi c'était le fouet. Il trônait à l'abri des regards, surtout du miens qui évitait de pointer en sa direction, je connaissait sa place. Ma mère n'avait qu'à tendre la main pour le présenter.
A son arrivée, c'était un objet anodin qu'elle avait déposé, c'était, me semblait il, pour dresser le chien, pour lui apprendre à ne pas pisser dans l'appartement, à ne pas déterrer les plantes, ni ronger les chaussures, je croyais fermement et naïvement à cet usage exclusif.
Sans aucun soupçons, j'ai assisté à la première de son entrée en vigueur. Ma mère venait de mettre le chien en laisse, comme pour le sortir (une corvée de plus que je devais assumer, quand il n'y avait pas lieu qu'elle s'en vante). Elle noua sa laisse bien court à la poignée de porte, ronde, en céramique. Ainsi l'animal n'avait pas la possibilité de s'assoir, avec peine il tirerait douloureusement sur sa laisse pour cambrer son arrière train à une vingtaine de centimètres du sol.
La discipline à la main, ma mère s'était mise en position pour cingler l'arrière de l'animal. La bête gémit de douleurs après une série de coups, elle commença à aboyer, aussitôt ma mère frappa vivement son museau, le chien se tut dans les râles. Elle continua à battre l'arrière train et le dos, il ne cessa de grogner en montrant ses dents, ce qui se soldaient par des coups sur sa gueule. Elle sévissait à l'en rendre fou, et il compris bientôt sa position sans issue, en proie à la discipline. Maintenant brisé il suppliait par sa gestuelle, par son regard, il suscitait la pitié. Il était prêt à se faire dicter n'importe quel ordre sans broncher.
Je venais d'assister de l'extérieur aux trois étapes de la punition dont parlait ma mère, la simulation, la colère, et la résignation.
Le cheminement me paraissait clair, j'étais dressée comme une chienne, d'ailleurs ma mère l'avait déjà dit à plusieurs reprises, qu'éduquer un enfant ou un chien, c'était pareil, pour leur faire rentrer quelque chose dans le crâne, il fallait prendre la discipline. Les parents qui n'en faisaient pas usage courraient à la catastrophe, on en voyait déjà les prémisses à travers les comportements de leurs cigales, et ces mêmes parents pleureraient le fruit pourris de leur progénitures.
Les cigales c'étaient celles et ceux qui me toisaient à l'école, parce que je portais des fripes démodées (ça a commencé au collège), sans marques, parce que je n'avais pas leur attitude, que je ne riait pas de leurs blagues arrogantes et moqueuses, parce que la futilité de leur discussions m'était incompréhensible et pénible, j'étais tout de suite mise à l'écart de cette catégorie qui riait avec ou sans raison.
J'aurais aimé qu'on les claque, qu'on leur fasse comprendre à coups de ceinture où était la raison. Je les détestais trop pour les envier, et de toute façon ils regretteraient plus tard d'avoir été trop choyés.

Tout ce que je voulais c'était que ma mère soit moins sévère, qu'elle ne frappe pas aussi fort et aussi souvent, qu'elle me laisse une chance de me racheter quand j'avais fais une faute. J'étais pas une chipie, je faisais ce qu'on me demande sans me plaindre, et si j'avais oublié quelque chose c'était pas exprès, et si j'avais fait une faute, c'est souvent parce que je ne savais pas qu'il ne fallait pas le faire.
Rarement elle pardonnait, et jamais sans que je la supplie, sans que je me mette à genoux devant elle. Elle m'avait déjà dit que je devrais lui baiser les pieds pour la remercier d'avoir été indulgente, ce n'était que des mots, mais j'étais prête à le faire si seulement ça pouvait m'éviter de me faire punir.

"Cécile", sur le même ton, neutre et sec, ma mère venait de m'appeler au salon.
Incertaine, dans l'angoisse de ce qu'elle avait à me dire, j'arrivais aussitôt. Attendre un deuxième appel, c'était la mettre en colère, "combien de fois il faut que je répète !", "tu entends quand je te parle !", je connaissais le refrain.
Cette fois j'eus droit à une question, pourquoi le linge sec trainait encore sur le séchoir, j'aurais du l'empiler depuis longtemps pour qu'on le repasse.
Je ne savais quoi répondre. Si autrefois elle me demandais de le ranger, aujourd'hui c'était devenu une faute de l'avoir laissé ainsi, une fois encore, je manquais à mes responsabilités, combien de fois il fallait qu'elle me répète ce que j'avais à faire, je n'écoutais pas, j'étais une fénéante. Elle allait sévir avec moi, c'était promis.
"Mais, je savais pas ...", j'entrais dans des explications aussitôt coupées irréversiblement par un ah tu savais pas, tu n'écoutes pas ce qu'on te dit, je vais te le faire entendre moi, avec la discipline du chien, tu vas le retenir. Quand elle était en colère ma mère usait d'une répartie sadique, dont maintes phrases on empreint ma mémoire.
Alors, je n'avais pas encore à l'esprit la crainte du nouveau martinet qui, quelques jours auparavant, avait été mis en pratique pour l'éducation canine.
Je n'avais pas pris note des regards insistants de ma mère, qui durant les remontrances oscillaient entre ma direction et le haut de la bibliothèque. Plus tard j'étais prévenue par habitude que plus de deux regards en direction de la discipline c'était plus qu'une menace, c'était la punition qui s'annonçait.
En larmes, l''estomac serré, la punition je la sentais venir, je le savais quand j'allais pas y échapper, quand ça allait être sévère, ma mère venait de me l'annoncer :
"Tu vas gouter à la discipline".




1_L'Atmosphère Générale



L'auteur principal de mon éducation a été ma mère, alors que mon père tenait majoritairement un rôle d'épouvantail.
Le sentiment premier que j'éprouvais vis à vis de mes parents c'était la peur.
Pour ma mère la punition devait être rare, pour pas que je m'y habitue et la banalise, mais sévère pour que je la craigne et que je m'en souvienne. Si j'ai à faire une moyenne, je dirais qu'une à deux fois par mois je me faisait corriger. Quand je rentrais de l'école à la maison, c'était souvent avec la crainte d'avoir fait une bêtise ou d'en faire une une fois arrivée. 
Le chemin durant, je passais en revue les raisons éventuelles qui pouvaient me faire punir, est ce que je n'avais pas laissé trainer des affaires en partant le matin, ne m'étais je pas salie, etc ... . Si ma mère me voyait avec une chaussette ballante au pieds, je me prenais une gifle pour m'être négligée. C'était parfois des peccadilles qu'elle montait en épingle quand elle était de mauvaise humeur, qui était chez elle un état récurent, et je me faisait gronder. Quand elle criait après moi, j'avais peur que ça finisse mal. Ca commençait par des remontrances corsées et j'avais tout intérêt à prendre une attitude pénitente pour éviter de me faire rosser.
Elle m'appelait toujours sur le même ton, que ce soit pour faire une course, essayer des fringues, des recommandations,  une corvée, ou encore pour ce que j'appellerais une discussion cuisante. Elle prononçait juste mon nom et je venais la voir sans savoir à quoi m'attendre, angoissée.
Appelée dans sa chambre, debout, elle me faisait face, moi, le regard baissé, j'écoutais les reproches dont la tonalité s'accentuait, espérant qu'elle retombe. Elle ouvrait la porte de son armoire durant sa discussion. Je pleurais déjà connaissant la suite. Sur une des portes pendaient ses ceintures, elle prenait soin d'en choisir une, les essayant tour à tour sur la paume de sa main. Son choix revenait le plus fréquemment sur sa favorite, une fine en cuir couverte d'une peau de serpent bordeaux avec une boucle en demi ellipse dorée. Une bonne ceinture devait être fine, lourde et élastique, c'était le genre de propos qui se tenaient à table chez ma tante ou ma marraine quand les sujets tournaient autour de l'éducation. Elle enroulait la ceinture autour de sa main laissant une longueur suffisante.
"Tourne toi !" ou encore "A ta place !", j'avais ma position, les jambes serrées, cambrée, les paumes contre le mur, après avoir ôté jupe ou pantalons. Je restais en sous vêtements, le pull ou la chemise remontés, roulés au dessus de la taille ou pincés sous l'élastique des collants.
Ma mère avait défini trois stades dans la punition.
Le premier, où je faisais mon "cinéma" pour susciter la pitié.
Le deuxième où je montrais ma colère, "elle montre ses dents" disait elle.
Enfin le troisième, quand elle m'avait brisé, que la douleur était intenable, quand je gémissais, suppliait le pardon, c'était là qu'on entendait un sincère repentir. C'était précisément cette étape qu'il fallait faire durer pour me faire comprendre, pour m'éduquer, c'était la plus importante.
J'avais maintes fois entendu la menace "je vais te dresser, tu vas voir".
La correction se composait de séries de coups rapides jusqu'à ce que j'en crie, que j'en hurle. Après chaque série sa voix montait pour prononcer des remontrances, pour me questionner, est ce que j'allais recommencer, est ce que j'en 'étais fière de ce que j'avais fait, est ce que j'avais bien compris. Elle attendais une réponse bien claire. Je me ressaisissais au plus vite pour extirper quelques paroles intelligibles de mes râles, de mes pleurs, avant que des coups ne précèdent un "J'ai pas entendu !".
Durant la punition j'étais contrainte à perdre toute fierté, à reconnaitre que j'avais été mauvaise, que je l'avais mérité, à supplier qu'on me pardonne promettant d'être meilleure.
Après chaque série j'espérai que c'était la dernière, que ce serait fini, c'est pourquoi je faisais preuve d'humilité et de résignation pour lui montrer que j'avais bien compris, que maintenant je serait sage, qu'il n'y avait pas lieu de continuer à me punir.
Le pardon s'obtenait au bon vouloir de ma mère, si elle avait décider de me réduire à l'état de loque me laissant juste le temps de reprendre mon souffle, la voix cassée, éteinte par les cris, j'avais beau supplier, j'allais serrer les dents et mordre mes manches.
Périodiquement, sur un ton hurlant elle me rappelait à ma position initiale. Si j'avais l'audace de porter une main pour couvrir mon derrière elle me cinglait sur les mollets et les cuisses, alors je baissais ma main pour protéger mes cuisses et c'était à nouveau les fesses qui en prenaient, si je n'avais toujours pas compris, elle me cinglait les paumes jusqu'à ce que je les retire. Un jour j'ai attrapé la ceinture en la serrant dans ma paume, je ne lâchais pas prise, pétrifiée. Elle a déroulé de sa main l'autre bout de ceinture, et j'ai reçu quelques coups coté boucle sur mes cuisses, au premier coup j'ai lâché prise et me suis remise comme je devais. Depuis, si l'instinct me poussait à protéger mes fesses de mes mains, mon mouvement s'arrêtait par une hésitation qui me rappelait que ça allait être pire, s'en ai devenu un signe de supplication de présenter mes paumes tremblantes en périphérie des fesses, comme de galoper sur place remontant mes mollets tour à tour contre les cuisses à quoi ma mère répondait par des séries de coups sur les jambes.
"Tu arrêtes ton cinéma !", "Tu te tiens droite, et tu cambre les fesses !", c'étaient les seules consolations aux quelles j'avais droit, mais qui aussi marquaient une pose laissant place aux menaces, aux remontrances et ne faisait que rajouter de l'huile sur le feu.
Quand c'était fini, le visage dégoulinant, je demandais le pardon à genoux devant elle, extirpant des semblant de phrases intelligibles qu'elle me faisait répéter jusqu'à ce qu'elles soit suffisamment claires, son regard sévère fixé sur moi épiant le moindre signe de colère, aussi bien dans ma mimique que dans ma voix. Je répétais cette prière, ces promesses, en concluant par "Merci Maman". J'avais du mal à prononcer cette fin de phrase, mais c'était une des conditions à ce qu'on ne reprenne pas les châtiments. L'autre condition c'était que je devais cesser les pleurs et me calmer à genoux contre le mur où j'avais été punie.
Dressée, c'est le mot qui correspondait le mieux à mon éducation. Ma mère m'avait bien fait comprendre qu'il y avait toujours pire si je n'obéissait pas, et elle en avait un exemple vivant à l'étage au dessus. Elle me disait qu'elle était trop bonne avec moi, je n'avais qu'à prendre pour exemple comment on traite ceux de l'étage au dessus pour faire preuve de plus de gratitude à son égard.
Après une correction j'avais mal à poser mes fesses sur une chaise au moins durant une semaine, le pire étant les trois premiers jours, j'en faisais des grimaces. En classe, avant de m'assoir je vérifiai que personne ne me regarde avant de poser délicatement mes fesses sur les chaises en bois. Si à ce moment des regards pointaient en ma direction, je ravalai ma salive et feignais qu'il n'en fût rien.
Mon entourage me laissait supposer que se faire rosser était un fait normal et bienvenu, celles qui étaient mal éduquées je les remarquai aussitôt par leur comportement frivole et insouciant, pour moi c'était des garces, des filles pourries et gâtées, j'évitai de les fréquenter, d'ailleurs ça ne me rapportait que des ennuis. A l'école je m'entourais de personnes de ma condition ou du moins qui semblaient l'être.